mercredi 20 juin 2012

Les méthodes décapantes d’un patron néerlandais

Leen Zevenbergen, ancien dirigeant de la SSII Origin et actuel président de Qurius, a choisi de bousculer les règles de management classiques.
S’adonnant à un véritable réquisitoire contre les méthodes de management traditionnelles, Leen Zevenbergen, patron néerlandais de cinquante-deux ans qui a fait ses preuves à la tête de prestigieuses entreprises dont la SSII Origin (rachetée par Atos en 2000), relègue l’ordre établi qui règne au sein des sociétés au rang de carcan. Les ordres, la hiérarchie, les horaires établis constituent autant de freins à la croissance, selon ce dirigeant, président depuis quelques mois de la société de nouvelles technologies Qurius.Pour lui, le plaisir au travail est une valeur d’entreprise. Une règle d’or exposée dans son dernier livre, « Brûle ta cravate et danse » (ESF éditeur). Sa réponse à la question sur son nombre d’heures hebdomadaires travaillées est éloquente :« Vu mon plaisir au travail, je ne travaille jamais. »De fait, la frontière entre sa vie privée et professionnelle a sauté. Une réunion avec des collaborateurs peut se tenir à 10 heures un samedi avant un match de football avec ses enfants. Ou vice versa. Et ce mode de fonctionnement concerne aussi ses salariés, qui peuvent aller à la plage, jouer au golf, recevoir leurs courriels personnels, inviter leur famille au bureau ou ne rien faire, pourvu que les résultats soient au rendez-vous.« Le débat sur les 35 ou les 40 heures n’a pas de sens. Google l’a compris en laissant ses bureaux ouverts à ses salariés 24 heures sur 24 »,remarque ce patron hors normes, qui a fait un tour du monde sac au dos avec ses cinq enfants voici deux ans.

« Les entreprises doivent lâcher prise et les patrons faire en sorte de permettre à l’énergie des salariés de remonter à la surface »,explique Leen Zevenbergen, pour qui la motivation des employés est un maître mot.« Le patron idéal doit être une source d’inspiration. Je passe un quart de mon temps à parler à mes collaborateurs pour les motiver »,insiste-t-il. Son principal objectif : faire place à la créativité à tous les échelons de l’entreprise.« Un leadership dictatorial ne fournit pas une source d’inspiration pour les talents. Pour les attirer, il faut un environnement qui leur permette de s’exprimer. Je ne veux pas qu’on attende mes ordres, cela n’est pas créatif »,explique Leen Zevenbergen, dont tous les salariés disposent de cartes de visite personnalisées par quatre mots qui leur sont chers.Et pourquoi, via un livre, un tel coup de pied dans la fourmilière ?« Pour faire la preuve que le management classique a vécu : la moitié des salariés en France et aux Pays-Bas ne se plaisent pas au travail. Résultat, ils produisent moins et sont moins avenants avec les clients »,répond Leen Zevenbergen, pour qui l’équation« moins de règles égale plus de liberté »doit faire foi dans l’entreprise. Ces griefs s’adressent principalement aux dirigeants à l’ancienne qui savent tout et se croient indispensables.« Si le patron se casse la jambe, cela doit-il empêcher l’entreprise de fonctionner ? »questionne-t-il en ironisant.« Le patron qui fait en sorte d’être indispensable se met à l’abri de tout licenciement et a tendance à mettre ses collaborateurs sous carcan. »Crise ou non, les recettes novatrices de « Brûle ta cravate et danse » pour créer de la croissance sont à consommer sans modération. Les économies, les réductions de coûts et les plans sociaux sont de faux remèdes, si l’on en croit l’ouvrage du Néerlandais. « Si la situation économique est mauvaise, les dirigeants doivent motiver encore plus leurs collaborateurs pour produire davantage. Dans ce cas, chaque salarié compte. Tout le personnel devient nécessaire pour amortir la mauvaise conjoncture dans l’entreprise, même les je-m’en-foutistes »,explique-t-il.Pour lui, le salarié qui ferait partie de la « première charrette » en cas de plans de licenciement dans une entreprise traditionnelle peut jouer un rôle social à la manière de la goutte d’huile dans un moteur.« A côté de la structure de production d’une société, il existe une structure sociale. Cette cohésion est assurée grâce au rôle de certains salariés dont la productivité est parfois faible. Les licencier n’est pas forcément le bon choix »,remarque-t-il.Cette conception déroutante de la vie de l’entreprise laisse peu de place aux actionnaires. Au mois d’avril, lors de sa première assemblée générale devant les investisseurs de Qurius, certains d’entre eux avaient d’ailleurs fait part de leurs inquiétudes à la suite de déclarations déroutantes de leur nouveau président.« Une cotation en Bourse n’est pas commode. En cela, je suis jaloux des entreprises familiales »,avait-il concédé à des journalistes.
Didier Burg (aux Pays-Bas)

Selon Leen Zevenbergen, président de Qurius, les ordres, la hiérarchieet les horaires établis constituent autant de freins à la croissancedr Les Echos Date : 01/09/2010
Page: 011 Section: Les stratégies

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