dimanche 1 septembre 2013

Jacques Benveniste

Jacques Benveniste (12 mars 1935 - 3 octobre 2004), médecin et immunologiste français, connu du grand public pour avoir publié en 1988 des travaux de recherche sur la mémoire de l'eau donnant naissance à une controverse qui a mené à son éviction de l'INSERM en 1995.

En 1951, il obtient un baccalauréat. De 1953 à 1960, il étudie la médecine à la faculté de Paris.
À partir de 1965, il travaille à l'Institut de recherche sur le cancer du CNRS, puis en parallèle devient chef de clinique à la faculté de médecine de 1967 à 1969. Il exerce alors à la Scripps Clinic & Research Foundation en Californie.
Il atteint la notoriété en 1971 par la découverte d'un facteur activateur des plaquettes sanguines, le PAF-Acether.
En 1973, il est à l'emploi de l'INSERM où il poursuivra le reste de sa carrière. Il y dirigera plusieurs unités de recherche. Il est le conseiller de Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de la Recherche, de 1981 à 1983.
Jacques Benveniste décède à l'âge de 69 ans lors d'une opération du cœur, le dimanche 3 octobre 2004.
Pour Éric Favereau de Libération : « Jacques Benveniste restera l’homme d’une polémique dans laquelle il aura tout gagné et tout perdu. Jacques Benveniste n’avait pas toujours été un chercheur à part. Jusqu’à sa découverte contestée, il avait été l’un des scientifiques français les plus publiés en immunologie, sa spécialité de départ, et les plus appréciés. En 1971, sa découverte d’un facteur activateur des plaquettes sanguines l’avait même placé dans tous les manuels de médecine ainsi que sur la liste des nobélisables. »

Pour le grand public, le nom du chercheur reste attaché à ses expériences réalisées dès 1984, alors qu'il était sous contrat avec les laboratoires d'homéopathie Boiron sur ce qui a été appelé la « mémoire de l'eau ». Le chercheur et son équipe affirment en 1988 être parvenus à activer la dégranulation de basophiles avec des hautes dilutions d'anticorps IgE. La réponse biologique observée est interprétée par Benveniste et son équipe comme la démonstration que l'eau avait conservé les propriétés d'une substance qui ne s'y trouvait plus. Ce résultat pouvait être vu, entre autres, comme validant partiellement le modèle de la dilution en homéopathie.
Cette publication déclenche de fortes réactions de la communauté scientifique internationale. Malgré la qualité de ses découvertes antérieures, Jacques Benveniste, qui refuse de chercher à confirmer sa théorie en utilisant un autre étalon que cette réaction de dégranulation des basophiles, finit par être discrédité comme chercheur. Il doit quitter l'INSERM en 1995, à 60 ans, mais n'abandonne pas son métier de chercheur en continuant ses recherches dans le cadre de la société Digibio qu'il a créée en 1997.
En 1991 et 1998, Jacques Benveniste reçoit le Prix parodique Ig Nobel de chimie pour son affirmation que l'eau a une mémoire et que ses propriétés pouvaient être transmises par des vecteurs ondulatoires appropriés et notamment via le téléphone et Internet1.

Un livre posthume2, paru en 2005, éclaire sa vision de ses travaux, notamment leurs aspects méconnus la « biologie numérique », et expose ce qu'il considère comme des travers du milieu de la recherche. Le laboratoire créé par Jacques Benveniste a poursuivi ses travaux après sa mort.
Le 27 octobre 2007, lors de la conférence de Lugano, en Suisse, le professeur Luc Montagnier, Prix Nobel de médecine 2008, a publiquement déclaré avoir constaté lors de ses travaux sur le VIH des phénomènes décrits par Jacques Benveniste3.
Luc Montagnier a écrit en février 2008 dans son livre Les combats de la vie publié chez Lattès : « La biologie moléculaire […] a atteint des limites et elle n'explique pas tout. Certains phénomènes, comme l'homéopathie, restent mystérieux. Je fais allusion à certaines idées de Jacques Benveniste (le scientifique qui a inventé la « mémoire de l'eau ») car j'ai récemment rencontré des phénomènes que seules ses théories semblent pouvoir expliquer. Je pars d'observations, pas de croyances. Certaines choses nous échappent encore, mais je suis convaincu qu'on saura les expliquer de la manière la plus rigoureuse. Encore faut-il pouvoir mener des recherches à ce sujet ! Si l'on commence par nier l'existence de ces phénomènes, il ne se passera rien. ».




 
On avait prévu de construire cela comme un dialogue. Mais cela demandait trop de travail et il y avait d'autres urgences. Je vais donc résumer à grands traits, maintenant que Jacques est mort.
Il était tout sauf croyant. Jacques, issu d'un famille juive, ne croyait ni à Dieu, ni au Diable. Il conservait une foi naïve en la Science. Celle-ci lui joua la plus folle des entourloupes possibles. Je ne vais pas reprendre cette histoire par le menu. Jacques avait un jour été confronté au problèmes des Hautes Dilutions. Cela avait commencé par du venin d'abeille. En injectant celui-ci dans du sang humain on provoquait une réaction de type immunologique. Jacques était avant tout un immunologiste. Moi, je n'y connais pas grand chose, sauf que cette réaction se traduit par un comportement de globules blancs qu'on appelle des basophylles. Ceux-ci " dégranulent ", libèrent des susbtances contenues dans de mini-capsules et on parle alors de " dégranulation des basophylles ". On met le phénomène en évidence en colorant ces trucs et on peut décompter " le nombre de basophylles qui ont dégranulé " à l'aide d'un microscope.
Voilà donc mon Jacques qui un beau jour suit ce qu'on lui avait suggéré. Il dilue, dilue, jusqu' à plus soif. L'effet s'atténue, s'atténue. Eh puis, sans crier gare le voilà qui remonte, alors qu'en fonction de cette dilution il ne devrait plus rester la moindre molécule de venin dans cette fichue éprouvette.
- Diluez... diluez, il reste toujours quelque chose.....
Ben envoie ce travail à la revue Nature. Le referee l'accepte. Il est dans les normes. L'expert estime que les auteurs sont honorablement connus. Mais avant que l'article ne paraisse, John Maddox, le rédacteur en chef de cette prestigieuse revue, a un coup de sang.
- Pas de ça chez moi !
Il somme Ben de retirer son article en lui disant qu'en cas de refus il lui garantit les pires ennuis.
Jacques refuse. L'article paraît et c'est le scandale. Nature envoie à l'Inserm 200, chez Benveniste, un commando constitué par des biologistes, plus un physicien accompagnés par Randi, un prestidigitateur chargé de détecter les fraudes. C'est insultant. Mais l'équipe se prête au jeu mais les résultats s'avèrent décevants . Les bouteilles de champagne restent tristement au frigo.
Maddox exulte, prétend que dans le papier publié le décompte des fameux granules, effectué par une laborantine, est entaché d'erreur. Benveniste se lancera alors dans un combat qui, au d'années, aura raison de sa santé. Il recherche une expérience qui soit exempte de cette faille humaine possible et trouve le moyen d'accélérer les battements d'un coeur de rat avec je ne sais plus quoi, mais toujours aussi dilué. Charpak, académicien, prix Nobel de physique est invité au labo et témoin d'une expérience réussie. On injecte ce qui, en fonction des dilutions effectuées ne devrait plus être que de l'eau pure. Et voilà le coeur qui s'emballe sous les yeux de l'académicien.
Charpak se retire, impressionné.
Il demande que l'expérience soit rééditée ailleurs et cette fois c'est un échec. Jacques ne comprends pas. Les années passent, il bataille, cherche un protocole imparable. Certaines de ses idées idées sont fort logiques. Les protéines vont souvent, pour ne pas dire toujours, avec un cortège très important de molécules d'eau, qui les entourent comme un cocon. Comment, dans ces conditions le modèle de l'Institut Pasteur " clé-serrure " pourrait-il fonctionner ? Comment ces protéines pourraient elles interagir puisqu'elles cheminent entourée de ce matelas qui masque leurs formes.
Simple, dit Ben : elles communiquent à l'aide d'ondes électromagnétiques.
Le mot est lâché. En biologie, l'électromagnétisme, c'est de la sorcellerie.
- Dilutions Dangereuse....
- D'où vient l'énergie, dit un chimiste ?
- Les protéines servent d'antenne, de résonateurs. Elles exploitent l'énergie électromagnétique ambiante, explique Jacques. D'ailleurs, quand j'enferme ces molécules à l'abri d'un écran protecteur, d'une cage de Faraday, elles ne communiquent plus !
Benveniste se lance alors dans des expériences où il fait passer au travers une substances biologique, dont il prétend pouvoir enregistrer la " signature ", une onde électromagnétique, et ce qui émerge s'en va " activer de l'eau pure ", située sur son chemin. Plus fort encore : il prétend stocker sur disquette le signal numérique, sa signature, en quelque sorte le " code-barre " de la biomolécule.
Entre temps l'Inserm l'a privé de ses superbes locaux, au premier étage de l'Inserm de Clamart. Tétu, il installe des baraquements Algeco dans la cour du labo et reprend ses expériences. Tout cela durera des années, d'une lutte épuisante, dommageable, pour un homme au coeur maintes fois rafistolé. Mais Benveniste est persuadé que la Nature apportera son verdict. Tout est une question de protocole, pense-t-il, confiant. Méthodiquement il tente d'éliminer toute intervention humaine. Il travaille alors sur des expériences de coagulation. Les dilutions sont effectuées par un robot, de même que l'ensemble des manipulations.
Parfois les résultats cafouillent, mais Jacques a confiance :
- Nous ne maîtrisons peut être pas tous les paramètres, mais nous finirons bien par déboucher sur sur totalement reproductible. Et alors ! ....
Et alors l'affaire sera jugée, tranchée. Il se sera suffisamment battu pour cela, épuisant ses dernières forces. Il parcourait la planète à la recherche de subsides, conférençait. Que de fois lui ai-je dit :
- Jacques, tu vas y laisser ta peau !
Mais il ne pouvait plus faire marche arrière. Il avait créé " DIGIBIO " le premier " laboratoire de biologie numérique ". Il avait trouvé des sponsors, des investisseurs, pris des brevets. C'était la course en avant complète, sans la moindre possibilité de retour en arrière. Jacques se battait, se battait, ne pensait qu'à améliorer de manière irréfutable sa méthodologie. Il finit par intéresser ... l'armée américaine à ses recherche. Pourquoi l'armée ? Ca, mystère. Toujours est-il que lui est ses collaborateurs se rendirent outre Atlantique, multiplièrent les démonstrations réussies.
Les Américains furent impressionnés, achetèrent un robot identique à la machine française et réalisèrent sous la direction de Jacques ces étonnantes expériences.
Puis vint l'épilogue, le baissé de rideau. Quand Benveniste fut rentré en France es Américains câblèrent :
- On annule le contrat. Ca ne marche plus....
- Mais enfin ! Vous avez vu. Quand nous étions là-bas, ça marchait magnifiquement !
- Oui, oui, tout à fait. Nous ne disons pas le contraire. Mais nous avons analysé l'ensemble des expériences et découvert quel était le paramètre clé qui faisait que ça marchait.
- Et c'est ? .....
- Quand votre collègue Machin était présent à côté de la machine ça marchait à tous les coups. Mais depuis qu'il est reparti avec vous, fini... C'est aussi simple que ça. C'est lui qui fait marcher le truc, à distance.
Jacques le savait déjà, mais refusait désespérément d'y croire. Il me disait :
- C'est bizarre. Quand ce type est là, simplement assis à quelques mètres de la machine, ça marche mieux. Je dirais même que ça marche à tous les coups. C'est à n'y rien comprendre..
Tout cela sentait le paranormal à des encablures. Je peux en témoigner : c'était tout sauf la tasse de thé de Benveniste. L'armée américaine était sa dernière carte. Les Américains sont pragmatiques :
- Quand le copain de Benveniste est présent, ça marche, tout le temps. Quand il n'est pas là ça ne marche plus. C'est comme ça. Mais il reste que c'est au final un échec, donc on annule le contrat ....
Voilà la vérité, telle que je l'ai connue et telle que la connaissent également ses proches collaborateurs. Un scientifique totalement rationaliste, totalement honnête, cherchant le fil conducteur de la pure raison s'était simplement battu, sans le savoir, avec la pire des engeances possibles, l'interaction esprit-matière.
Ceux qui croient que la Nature obéit au reproductible, est rationnelle, se logent le doigt dans l'oeil jusqu'à l'épaule. C'est la plupart du temps le cas mais parfois elle vous réserve de sales blagues, qui mettent le scientifique complètement en porte-à-faux. Le non-reproductible, l'incontrôlable nous laissent complètement désarmés. Je préfère les maths. Ca, c'est du reproductible, du moins en principe.
trois fois sept ça fait vingt et un, tous les jours de la semaine....

Enfin, je dis ça, mais il y a des mathématiciens qui ont de drôles de vies. Il y a peu de temps on filmait l'interview de l'un d'eux qui nous racontait comment il parlait aux arbres, d'où il tirait sa science. Comment, étant jeune, il avait été dans une secte d'adonnant à la magie et noire et comment leur chef de file avait vendu son âme au diable pour un théorème. Un truc important, quand même. La somme des cubes des nombres entiers est un nombre irrationnel, ou quelque chose d'approchant.
Le jeune qui avait filmé cette séquence, sous les lambris dorés, l'effaça par mégarde, à cause du champagne. Mais c'est peut-être mieux ainsi. Ceci étant, une douzaine de personne ont pu voir de leurs yeux, entendre de leurs oreilles ce que je connaissais de longue date. Il y a des choses qu'on ne sait pas classer. C'est comme ça.
Revenons à Jacques. Il était épuisé. Il s'était trop battu. La vie se retirait de lui. Son coeur rafistolé partait en miettes. Il est mort sur une table d'opération. Se battre, je sais ce que c'est, que oui ! Et je me demande pourquoi, parmi nous trois : lui, Bounias et moi, j'ai survécu. Sans doute parce que j'ai su maintes fois décrocher pour trouver abri ailleurs, dans un autre domaine. Dans les bandes dessinée par exemple. C'est pour cela que j'ai fait tant de choses. Je sais ce que c'est que d'essuyer des tirs croisés, implacables. Je repense à la phrase de Rémy Chauvin :
- Dans notre monde université-recherche, il ne faut rien exagérer. Ca ne va jamais plus loin que l'assassinat !
Ci-après un dessin que Jacques avait encadré, dans son bureau :

comment_ca_va

Ben et Bounias sont mort " sur le front de la recherche ". Mais l'épilogue le plus fou c'est celui qu'a connu Jacques.
Je vais terminer en citant une anecdote, qui se trouve dans le livre du gars dont j'ai oublié le nom. Il me rappellera à son bon souvenir. Un jour un bonhomme arrive au labo de Benveniste avec un "machine" de son invention. C'était ... un simple petite boite, vide. Pas d'alimentation, pas d'antenne, rien. Les détails sont dans le bouquin, si on peut appeler cela des détails. Le type leur fait une démonstration de son " appareil " qui fait des miracles, provoque nombre de phénomènes, à la demande. Benveniste et ses collaborateurs restent médusés. Quand l'homme repart avec sa boite vide, un proche collaborateur de Benveniste lui dit :
- Bon, qu'est-ce qu'on fait, maintenant ?
- On commence par la fermer.
.


Le temps a passé. Jacques est mort bêtement, doublé par une chimère vicieuse, lui qui était l'honnêteté même. A une époque j'avais fait des dessins. Je les ai retrouvés et je vous livre, en vrac. Une sorte de vide-grenier numérique..

eau-liquide



ours


souris



souris2


direction_cnrs


vidal



benveniste


rendez_vous


luc montagnier

Le professeur Luc Montagnier, prix Nobel de médecine, en 2007, à Lugano



Celui-ci n'y va pas avec le dos de la cuillère et n'hésite pas à déclarer que Jacques fut un précurseur génial, en avance sur son temps, et sa conviction qu'un jour on reconnaître la justesse de ses vues.

Je me rappelle l'époque où le directeur général de l'INSERM, Lazare, avait enlevé à Jacques ses 200 mètres carrés de locaux à l'INSERM 200 de Clamart, ce qui l'avait conduit à se résinstaller dans les baraquement Algeco, dans la cour ! Une honte absolue.

Maintes fois j'avais dit à Jacques "abandonne, tu vas y laisser ta peau !". Mais il s'est accroché, accroché, jusqu'à son dernier souffle, jusqu'à ce qu'il y laisse sa vie, le coeur en lambeaux.

Ma carrière a présenté des aspects similaires et je n'ai du la vie sauve que parce qu'elle n'a été qu'une suite ininterrompue d'abandons : MHD en 1972 (en abandonnant à l'Institut de Mécanique des Fluides de Marseille l'installation avec laquelle j'avais amené en 1967 le labo en pointe au plan international), Informatique en 1983 (j'étais sous-directeur du service informatique de l'université de Provence), enseignement en fac des lettres, mathématiques (retournement de la sphère, Pour la Science 1979), un come back en MHD (1975-1986), abandon d'édition de BD chez un éditeur, en 1990, abandon rapide, dans les années eux mille, en égyptologie. Actuellement, quasi abandon, ou sérieuse mise en veilleuse en astrophysique, cosmologie et physique mathématique, faute d'échos positifs (1985-2008).

Actuellement, rebond avec Savoir sans Frontières et réédition de livres et de BD. Activités limite-abandon en MHD et sujet OVNI. Ci après la photos du banc MHD en cours de montage à Rochefort (état en mai 2010) :



labo ufo science

C'est dans le style des Algeco de Jacques, dans la cour de l'INSERM, à la différence que ce n'est pas moi qui m'en occupe, mais un courageux technicien de 40 ans. A la différence de Bernard Palissy, je ne brûlerai pas mes meubles.

La MHD française de pointe, la MHD "hors d'équilibre", celle des "plasmas bitempérature", qui nous permet de figurer au premier rang dans des ongrès internationaux (Vilnius 2008, Brème 2009), la voilà !

Ca serait comique si ça n'était pas d'une tristesse absolue

Il n'y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas comprendre


Jacques Benveniste.
...J'avoue que cela fait longtemps que je souhaitais pouvoir parler dans ces colonnes de mon ami Jacques. Mais, n'étant point biologiste, je pouvais difficilement commenter sa démarche et ses travaux, que je connais de longue date. Tout remonte à une dizaine d'années. A cette époque Benveniste fut intrigué par expériences faites en "haute dilution". Il possède une solide compétence d'immunologiste, de renommée internationale. Les recherches en question portaient donc sur la réaction immunologique du sang humain à du venin d'abeille. Bien que n'étant pas expert en la matière, je me souviens que la présence de ce venin provoque dans des lymphocytes un phénomène de "dégranulation", dans des cellules appelées "basophiles", intervenant dans les mécanismes de réaction immunologique, phénomène qui peut être mis en évidence en utilisant un colorant. L'intensité de cette dégranulation pouvait donc être mesuré par comptage, lors d'un examen d'échantillons sous microscope. Donc, procédure opératoire : on soumet des échantillons de sang humain à des doses données de venin d'abeille. La dégranulation s'opère et l'intensité de cette réaction immunologique est alors évaluée à travers un comptage effectué par des laborantines, l'oeil rivé à l'oculaire de leur microscope. ...Dans un premier temps, la réponse immunologique décroît au fur et à mesure qu'on diminue les doses de venin.

... Mais, au delà d'une certaine dilution le phénomène ne disparaît pas, comme on devrait s'y attendre. "Pire encore", ce phénomène de dégranulation reste encore détectable, parfaitement mesurable, pour des dilutions telles qu'aucune molécule de venin ne devrait subsister dans l'éprouvette. Du point de vue de la chimie classique il y a donc une contradiction complète. "Normalement", l'effet devrait disparaître en même temps que "l'effecteur". Si celui-ci n'est plus présent, qu'est-ce qui cause ce reliquat de dégranulation ? La presse lança alors ce mot "mémoire de l'eau". Précisons que cette expression trouva son origine dans la presse et non dans la bouche de Jacques Benveniste lui-même. Un article fut envoyé à la revue Anglaise Nature, mondialement connue. Celui-ci fut analysé par un expert anonyme et comme, ma foi, le protocole expérimental avait été, semble-t-il mené "dans les règles de l'art", compte tenu des normes habituelles en biologie, l'acceptation du papier fut signifiée aux auteurs. Sur ce Maddox, rédacteur en chef, découvri l'affaire et se mit dans tous ses états. Comme il lui sembla "impossible" qu'un tel résultat ne soit pas dû à une "erreur expérimentale" il demanda séance tenante à Benveniste de retirer lui-même son article, faute de quoi celui-ci devait s'attendre au pire, à une contre-offensive en règle dans la presse. Benveniste refusa et le papier parut, provoquant un scandale. Différentes revues s'attaquèrent alors à ce travail (dans l'article Benveniste se contentait de rapporter les faits constatés, sans proposer d'interprétation). La revue Science et Vie mena, en France, le combat, contre cette nouvelle "fausse science". Dans ses colonnes les journalistes écrivirent "comment voulez-vous qu'une molécule aussi simple que l'eau ait une mémoire ?". Etc. On reprocha au passage à Benveniste d'avoir confié le comptage de la dégranulation des "basophiles" à ses collaboratrices, ce qui pouvait induire une erreur de mesure "purement humaine". Or, et c'est pour cela que je présente ce dossier, ces expériences viennent d'être refaites par la biologiste Marthe Ennis, de la Queen's University de Belfast. Loin d'être une "fan" du célèbre "Ben" cette femme avait au contraire voulu refaire ces expériences avec une optique qui était celle du plus grand scepticisme. Mais, fait nouveau, elle pouvait cette fois utiliser un système de comptage exempt de toute intervention humaine, dont Jacques n'avait jamais pu disposer. Et, surprise, ses résultats confirment ceux obtenus douze ans plus tôt par le chercheur Français. Le "Guardian" consacre un article à cette affaire dans son numéro du 15 mars 2001, ce travail devant faire l'objet, en mai prochain (ce qui signifie que la communication a été examinée par un "referee" et acceptée) d'une publication scientifique en bonne et due forme dans "Inflammation Research Journal". ...En France, le Quotidien du Médecin publie un article d'une page, sous la plume de Vincent Bargouin, dans le numéro 6900 du 18 avril 2001. Citons simplement une phrase extraite du début de l'article

- Dans les années quatre-vingt dix, tout le monde, loin s'en faut, ne s'est pas satisfait de l'excommunication de Jacques Benveniste et, avec lui, de toute notion apparentée à la "mémoire de l'eau". Quelques irréductibles ont refait les expériences. Certains l'ont fait sous le manteau, mais d'autres l'ont dit.

...Vous avez bien lu ce mot, en rouge. C'est une ... première.

...Cet article fait suite à un papier d'une page publiée en Angleterre dans le numéro du 15 mars 2001.

...Nous ne ferons pas l'historique des tribulations de Benveniste, depuis douze années, que j'ai pu suivre, en tant qu'ami, pratiquement au jour le jour. Un véritable chemin de croix. Délaissant cette manip de réaction immunologique du sang sous l'action de venin d'abeille, Jacques monta alors des expériences où il provoqua une accélération d'un coeur de hamster sous l'effet d'injections d'un autre type d'effecteur, toujours à des dilutions telles que le phénomène devrait logiquement être absent. L'accélération des battements du coeur du rat était alors alors constatable de visu par le premier visiteur venu et Benveniste en fit, dans son laboratoire, la démonstration devant Charpak, prix Nobel, fort impressionné. Benveniste eut du mal, chemin faisant, à maîtriser cette expérience. En effet, là-dedans, rien n'est simple. Comme on ne sait pas ce qui est à l'oeuvre, comment savoir si on maîtrise tous les paramètres expérimentaux ? Il faut pouvoir avoir accès à tout, fabriquer soi-même sa propre eau distillée. En toute logique, le laboratoire devrait posséder une animalerie complètement isolée. Le système immunitaire des animaux peut a priori être sensible à des multiples paramètres, comme le pollen, par exemple. La première année, Benveniste découvrit par exemple que le phénomène semblait disparaître avec la saison froide. Le tout était de comprendre quelles devaient être les bonnes conditions expérimentales. Apparemment, la réaction des rats semblait moins forte quand leur corps, à la mauvaise saison, semblait entrer dans une sorte d'état de "latence". Etc....

...Alors que des moyens sophistiqués auraient dû être à la disposition de ce chercheur, il se retrouva, si je me souviens bien en 1995, mis à la porte de son propre laboratoire de l'Inserm, que j'avais visité par un "ami de longue date" par le polytechnicien Philippe Lazar, directeur général de l'Inserm (expression employé dans la notice nécrologique publiée par Michel Alberganti et Jean-Yves Nau dans le Monde du 6 àctobre, commentant la mort du chercheur, survenue quelques jours plus tôt). Comme c'était quelqu'un de tétu, Benveniste décida de s'installer, à l'étroit, dans des baraquements Algeco, dans la cour du labo. Lamentable. Mais la communauté scientifique française estima (et estime toujours) qu'il n'avait pas su faire la preuve irréfutable de la qualité de ses résultats.

...Au passage, une simple remarque, imaginée d'ailleurs par Souriau. Peut-on envisager une expérience comportant des dilutions successives, où le phénomène qu'on observe devienne insensible au taux de dilution, "l'effecteur" ayant physiquement disparu ? Oui, répondu Souriau : prenez des bacs d'un mètre carré, par exemple, contenant de l'eau pure en "surfusion". Celle-ci va se prendre en glace si la moindre impureté sert de germe à la croissance de la glace. Ce germe, cette impureté, peut être n'importe quoi, par exemple un poil de trou de nez. Le premier bloc gèle alors. Avec une cuillère, prélevez un centimètre carré de glace, pris au hasard dans ce bac. Probabilité de prendre l'impureté : une sur cent mille. Jetez cette glace dans le bac suivant. Cette jeune glace va alors immédiatement jouer le rôle de germe pour provoquer la prise de ce nouveau bac. Nouvau prélèvemente, au hasard, d'un échantillon de glace d'un centimètre carré, dans ce bas d'un mètre carré. La probabilité de récupérer l'impureté passe alors à 10-8. Au septième bac on est à dix moins vingt-huit. On dépasse le "nombre d'Avogadro". Les chances que l'impureté soit dans la cuillère sont devenues nulles. Et pourtant les bacs successifs se prennent toujours en glace.

...Quelle pourrait être le lien avec une expérience d'immunologie ou de biologie ? Deux physiciens théoriciens italiens, Preparata (décédé) et Del Giudicce avancèrent une hypothèse, il y a une dizaine d'année. On ne sait pratiquement rien, disaient-ils, de l'état liquide de l'eau. La théorie "classique" consiste à supposer que des "ponts hydrogène" suffisent à créer, en deça d'une certaine température, des liens suffisamment forts entre les molécules d'eau pour que la transition de phase s'opère, pour que la substance passe à l'état liquide, à une température beaucoup plus élevée que ne le feraient des molécules de complexités comparables comme l'ammoniac NH3 ou le gaz carbonique CO2, ou l'anhydride sulfureux SH2.

...Mais les deux physiciens, lors d'une réunion-débat fort agitée, dans une station de sports d'hiver (Puy Saint Vincent) et dans le cadre d'une manifestation organisée par le Journaliste de France-Inter Jean-Yves Casgha : "Science-Frontière", en présence de représentants de l'Institut Pasteur, montrèrent le résultat de simulations numériques, où on voyait le comportement de molécules d'eau, pendant un millième de seconde, à une température légèrement supérieure à la température de condensation : cent degrés. Ces molécules virevoltaient comme des folles et ceux-ci exprimèrent leur scepticisme quant à l'efficacité de tels "ponts-hydrogène" dans un milieu aussi agité. Sans exclure le recours à des telles liaisons, très forte, force est de convenir que cet état liquide de l'eau est fort mal connu. Au mieux certains physico-chimistes s'accordent-ils à penser que l'eau liquide serait constituée d'assemblages de molécules, liées par ces ponts, mais iles savèrent incapable d'en préciser la structure exacte, ni d'indiquer le nombres des molécules de H2O qui le constitueraient. Ne connaissant rien, ni à la chimie, ni à la biochimie, je me contenterai de rapporter ces déclarations. Mais je me souviens parfaitement que, lors de cet affrontement verbal qui eut lieu à Puy Saint Vincent j'entendis une phrase, prononcée par un chimiste du CNRS, qui reste encore présente dans ma mémoire :

- Eh bien moi, je ne sais pas pourquoi l'eau est liquide à la température ordinaire, et cela ne m'empêche pas de dormir !

...C'est une optique. Pourtant l'eau n'est pas une sustance rare, exotique. Comme me le faisait remarquer Souriau à mon retour : "C'est au contraire une susbtances chimiques extrêmement réactive qui participe à des tas de phénomènes... d'hydratation. La prise du béton est un hydratation. Dans les immeubles modernes, nous vivons dans des structures qui comportent une grande proortion d'eau. Si quelqu'un arrivuit sur une planète et lâchait une goutte d'eau à sa surface, alors qu'elle en serait dépourvue, il se produirait aussitôt une réaction violente d'hydratation".

...A Puy Saint Vincent, Preparata et Del Guidicce, physiciens (Preparata avait la chaire de mécanique quantique, à l'université de Milan) avaient hasardé que des phénomènes collectifs qui pourraient intervenir lors de la liquéfaction de l'eau : l'apparition de "quasi-molécules" mettant en jeu un grand nombre d'éléments H20. Qu'est-ce qui structurerait ces "quasi-molécules" ? Un phénomène, disaient-ils, comparable à l'effet "maser", à l'oeuvre dans les vastes nuages moléculaires interstellaires.

...D'où viendrait l'énergie, demandait un chimiste ? De l'énergie thermique de l'eau, répondait Preparata. Mais, ajoutait ce chimiste, qu'adviendrait-il si on supprimait cette source d'énergie ?

- Alors l'eau se changerait en glace, mon ami...

...Preparata et Del Giudicce suggéraient qu'il n'y ait pas "une eau", mais "des eaux", possédant des structures "quasi-moléculaires" différentes, déterminées par les impuretés qu'elles contiennent. Ces structures seraient par ailleurs "auto-reproductrices", ce qui pourrait expliquer, selon eux, comment une certaine information pourrait être mémorisée, en dépit de fortes dilutions. Ma foi, c'est ce que j'avais retenu à l'époque. Il était aussi dit que dans ces expériences de haute dilution, lorsque les échantillons d'eau pure (car elle l'était alors) étaient portés à 70°C, les effets disparaîssaient. On notera que cette structure de "quasi-molécules" n'est pas incompatible avec cette invocation des "ponts hydrogène" en tant qye facteur de laision.

...Le manque d'intérêt des chimistes et des biologistes pour... l'eau me sidéra à l'époque. Il n'y avait pas que ce problème de liquéfaction à haute température. Paradoxalement, l'eau est sans doute un des plus grand mystères de la chimie et de la biochimie. Comme le faisait remarquer Benveniste, les biomolécules ont tendance à s'hydrater, c'est à dire, concrètement, à s'entourer d'un véritable cocon constitué par des dizaines de milliers de molécules d'eau. Ben voyait difficilement comme le modèle en vogue à l'institut Pasteur, et en règle générale dans tout le monde de la biochimie, le sacro-saint modèle "clef-serrure" pourrait alors fonctionner. Il imagina que les biomolécules pouvaient communiquer à distance et non au contact, en se servant de leur enveloppe de molécules d'eau comme émetteur-récepteur d'ondes électromagnétiques. Ma foi, pourquoi pas ? Mais tout ceci se situait à l'opposé des thèses dominantes.

...Les choses "empirèrent" lorsque Jacques, il y a quelques années, imagina que l'on puisse enregistrer les signal émis par de telles biomolécules "encoconnées". Ainsi l'information biologique, qui constituait selon lui l'effecteur réel, pourrait être mémorisée, codée, dupliquée. On imagine le risque encouru par le puissant trust pharmaceutique international. Les expériences se sont succédées, menées dans l'exiguité de ces baraquements Algeco, qui ne font guère honneur à notre ministère, ni au CNRS. Actuellement Jacques a automatisé les analyses qu'il mène en utilisant de petits robots, des machines qui déplacent un bras manipulateur qui se saisit des éprouvettes, ajoute les réactifs, etc. Les recherches gagnent ainsi en précision et en rigueur, toute intervention humaine disparaîssant ( Jacques a été souvent ouvertement accusé de fraude ! ).

...Pendant un temps, ses détracteurs l'accusèrent de "rouler" pour la société Boiron, fabiquant des produits homéopathiques. Mais le temps passa et il fallu bien convenir qu'il n'en était rien. Benveniste est simplement un "fou de recherche" qui a sacrifié une carrrière qui aurait pu être "brillante". Séduisant, doté d'esprit de répartie, d'humour : il aurait même eu tout ce qu'il fallait pour devenir un homme politique. Il n'avait contre lui qu'il seul défaut : il croyait à la recherche et, dans les faits, il lui a tout sacrifié et n'a retiré de sa démarche que ... des emmerdements. Connaissant ses ennuis de santé, je me suis souvent demandé comment il avait fait pour tenir aussi longtemps (trois ans, en fait, à compter du jour où j'écrivis ces lignes, puisqu'il est décédé é en octobre 2004). .

...Je l'avais au téléphone aujourd'hui 25 avril 2001. Je voulais le féliciter pour cet article publié quelques jours plus tôt, où des gens, enfin, parlaient en sa faveur.

- Oui, mais qu'est-ce que ça change ? Nombre d'homme politiques ont le "Quotidien du Médecin" sur leur table, tous les matins. Et je ne vois rien venir.

...Qui bougera ? Qui sortira cet homme courageux des baraquement où lui et son équipe (on pourrait dire ses fidèles) campent. Je ne suis pas sûr que cette aide viendra. Mon vieux Jacques, je crois que tu te fais des illusions. Un ministre, c'est quelque chose qui sonne creux. Ca n'est ni fait pour agir, ni pour décider quoi que ce soit, surtout en matière de recherche. Ca "gère le quotidien". J'ai déjeuné une fois avec un ministre. C'était il y a bien longtemps. Il avait invité des chercheurs férus de micro-informatique, quand celle-ci en était à ses tous débuts. Au dessert il nous a fait un beau discours. J'avais envie de lui dire :

- Arrêtez. Nous ne sommes pas des électeurs. Vous n'êtes pas à la télévision. S'il vous plaît, pour une fois, dites-nous des choses plus intelligentes.....

...Je lui ai montré mon logiciel de CAO, le premier qui tournait sur un micro. Je voulais l'implanter à l'Education Nationale. Je pensais que cela réveillerait l'intérêt des jeunes pour les choses techniques. Mais je crois qu'il a pris cela pour un jeu vidéo.

...A quoi mènent ces démarches à contre-courant ? On se le demande parfois. Il est tellement plus facile de hurler avec les loups, de suivre la meute, de censurer au plus profond de soi toute vélléité d'idée vraiment novatrice. Car le confort d'une carrière est à ce prix, il ne faut pas se le cacher. Qui veut réussir devra passer à côté de son frère en difficulté et l'ignorer, si celui-là a la majorité des collègues contre lui. Notre système est construit comme une maffia. Il a son omertà, sa loi du silence. Un de mes étudiants, qui a d'ailleurs eu un prix scientifiques avec des idées qui n'étaient pas les siennes, il le sait très bien, a fait une carrière très confortable. Il a même été directeur régional du CNRS. Il poursuit, quelque part, son ascension. Qui sait, on le retrouvera peut être ministre un jour ? Il ne sera alors pas pire qu'un autre. Mais doit-on envier ces gens ? Personnellement ils m'ennuient profondément. Ils ont des regards de poissons morts. Je préfère les Benveniste.

...Ce qui est ennuyeux, c'est de ne pas pouvoir faire avancer des recherches, de manquer de moyens, tout en étant témoins de gâchis absurdes. Je ne pourrais pas dire qu'on s'y habitue. On se résigne, c'est tout.

Le site de Jacques Benveniste : http://www.digibio.com

1° juin 2001

...Je viens de reproduire d'adjoindre à ce dossier, dans mon site, la copie originale de l'article paru le 15 mars 2001 dans le journal anglais le Guardian, ainsi que sa traduction française. Au passage "Ben" m'a fait suivre la copie d'une lettre envoyée à la cantonade.


17 mai 2001

...Cher amis et ennemis (*)
...J'ai reçu quelques réactions à l'article du Guardian relatant la double reproduction de mes résultats. Je n'en ai pas reçu de vous (toi). Or il m'avait été dit : "faites reproduire vos résultats et on vous croira".
...Pourtant il ne se passe rien. Je vous rappelle que Georges Charpak, dont je crois tout ce qu'il dit, avait dit "Si c'est vrai, c'est la plus grande découverte depuis Newton !".
...Il semble bien que cela soit vrai.
...Alors ?
...Merci d'éclairer ma lanterne, un peu sourde.
Jacques Benveniste



17 mai 2001

...Cher amis et ennemis (*)
...J'ai reçu quelques réactions à l'article du Guardian relatant la double reproduction de mes résultats. Je n'en ai pas reçu de vous (toi). Or il m'avait été dit : "faites reproduire vos résultats et on vous croira".
...Pourtant il ne se passe rien. Je vous rappelle que Georges Charpak, dont je crois tout ce qu'il dit, avait dit "Si c'est vrai, c'est la plus grande découverte depuis Newton !".
...Il semble bien que cela soit vrai.
...Alors ?
...Merci d'éclairer ma lanterne, un peu sourde.
Jacques Benveniste

...L'échange téléphonique qui a suivi :

- Que veux-tu qui puisse arriver ? Il ne se passera rien. Quel officiel pourrait prendre ouvertement parti pour toi, décider de t'aider matériellement ? C'est impossible. Tes travaux, ta démarche vont à l'encontre d'une stratégie de profit, ta pharmacologie serait frappée du sceau de la gratuité. Tu as donc immédiatement contre toi toute l'industrie pharmaceutique, et Dieu sait si elle est puissante.

- Je sais.....

- Il te reste combien de temps d'ici la retraite ?

- J'ai 66 ans. J'ai tiré au maximum. C'est dans un an.

- Et à ce moment le CNRS ressortira la clause liée à l'existence d'un laboratoire : le fait que celui-ci contienne au moins trois personnes de catégorie "A", c'est à dire directeurs de recherche. Et si tu pars en retraite....

- Penses-tu ! On en est plus là. Depuis que je me suis installé dans ces baraques Algeco, qui représentent cent mètres carrés, mon labo de "Biologie Numérique" n'a aucune existence légale, administrative. Quand je serai à la retraite on me dira "monsieur, vous seriez gentil de dégager les lieux", puis on virera ces baraquements en trouvant opportun, par exemple, d'installer dans cette cour un chiotte ou un garage à bicyclette. Et personne ne bronchera. Qui s'en soucierait ?

- C'est effarant. On se demande à quoi sert le CNRS. On se demande si ces gens ont été mis en place pour nous aider à faire notre travail de chercheur ou au contraire pour le contrarier du mieux qu'ils le peuvent.

- Et toi, comment ça se passe ?

- C'est simple : après que j'aie abandonné la MHD en 87, il y a quatorze ans, je me suis reconverti au papier-crayon. Depuis vingt ans je n'ai pas un centime de crédits. Le dernier colloque auquel j'aie participé, j'y suis allé à mes frais. Le prochain, coup de chance, est en France.

- Mais ton labo te donne des crédits, un minimum ?

- Non, par un franc. J'ai fini par m'y habituer. Quand mon matériel informatique tombe en panne, je paye ces réparations. je n'ai pas de thésard. Sinon ceux-ci verraient leur carrière de recherche condamnée dès le départ. Il ne se passe pas de mois sans que des jeunes demandent à travailler avec moi. Je suis obligé de répondre par la négative. Je ne veux pas rééditer l'affaire Lebrun, ce gars qui avait fait une excellente thèse assortie de publications de haut niveau, et de deux communications dans des congrès internationaux (Japon, 1987 et Chine populaire, deux congrès internationaux de MHD) et à qui on avait dit (ces choses-là ne s'écrivent pas) : "comme vous avez travaillé avec Petit, il est inutile que vous espériez trouver une place dans un quelconque laboratoire".

- Qu'est-ce qu'il est devenu ?

- Il a monté sa boite, vingt salariés, qui marche bien. Il fait des simulations numériques de combustion dans des moteurs. Mais si "Lebrun ingénieur" a très bien réussi, "Lebrun, en tant que machine à créer du résultat scientifique de pointe", que j'avais façonné, est parti à la casse. Gâchis complet. Et tu sais très bien que pour faire "diverger" un gars, il faut au bas mot cinq ans. Je n'ai pas voulu recommencer. Mais, bon... on fait des choses avec un crayon et une feuille de papier, bien qu'au départ j'aie été expérimentateur. Et toi, que feras-tu dans un an ?

- On pourra toujours louer un local de cinquante mètres carrés quelque part et continuer.

- C'est de la folie ! Ca me rappelle ce labo de MHD que j'avais installé au début des années quatre-vingt dans une chambre de bonne d'Aix-en-Provence, sur seize mètres carrés.

- Le seul pouvoir qui pourrait s'opposer à cela, c'est la presse.

- La presse ? Je ne sais pas s'il faut beaucoup compter dessus.



9 décembre 2003

Il y a quelques mois mon ami Jacques était bien pessimiste. Son principal sponsor venait de lui claquer entre les doigts et, ne pouvant pu salarier les membres de son équipe il me disait que la perspective de devoir fermer sa boutique (quelques éléments Algeco) allait rapidement se profiler. Il ne pourrait même plus, me disait-il, aligner les sommes nécessaires pour maintenir les brevets internationaux qu'il avait pris. J'avoue que je ne voudrais pas être à sa place. S'il y a vraiment un homme à qui s'adresse ce vers des fables de Lafontaine :

Point de franches lippées, tout à la pointe de l'épée

c'est bien lui. De plus il a tout misé sur ces "hautes dilutions" et sur ce concept de "biologie numérique". Or l'expérience montre à quel point il est inconfortable de se situer en précuseur, de plus, isolé. De nos jours des "bandes organisées" ratissent la science, tiennent des revues de publication (il faut bien qu'elles soient entre les mains de groupes). Ces bandes distribuent des labels, en général à leurs membres. Ayant vécu moi aussi comme un Robin des Bois de la Connaissance je connais cette vie-là et ne m'en suis tiré à chaque fois qu'en abandonnant un domaine pour filer vers un autre.

Qu'adviendra-t-il de ce minuscule et peu coûteux laboratoire de biologie numérique ? Nul ne le sait. Mais il reste, j'en ai fait l'expérience, que les idées nouvelles mettent des décennies à s'imposer et que quand elles le font elles sont bien souvent entre d'autres mains que celles des hommes qui les ont énoncées les premiers.




Jacques Benveniste, opéré du coeur pour la troisième fois jeudi 30 septembre 2004
est mort deux jours après


Et voilà. Le rideau tombe. Une fois de plus la farce est jouée. Nous avions peur pour Jacques depuis des années en le voyant continuer de se battre dans l'état où il était, courir de tous les côtés pour essayer de trouver de l'argent pour continuer à maintenir en vie le vestige de ce qui avait été son laboratoire de recherche dans sa spécialité : l'immunologie et qui était devenu ce qu'il avait appelé le Laboratoire de Biologie Numérique. Il avait dû d'abord subir il y a douze ans un pontage coronarien. Puis, après une nouvel accident il y a deux ans on lui avait posé un stimulateur cardiaque. Cette fois-ci c'était une valve en titane. L'opération a mal tourné et Jacques a été emporté par une infection pulmonaire quelques jours après.

Marche ou crève.

Voilà comme la France traite, abandonne ses chercheurs les plus courageux et les plus hardis. En 2003 Michel Bounias, abandonné de tous, privé de moyens de recherche, est décédé d'un cancer dans l'indifférence générale. Bien peu ont parlé de cet homme, auteur d'une découverte exceptionnelle. Qui, cette fois, suivra le cercueil de Benveniste ? Charpak, l'académicien, qui réussit à le faire condamner pour procédure abusive après l'avoir lui-même diffamé ? Gérald Messadié, rédacteur en chef adjoint de Science et vie, auteur de cette phrase qui me revient en tête "comme voulez-vous qu'une molécule aussi simple que l'eau ait une mémoire ?".

Combien comptera-t-on d'homéopathes dans ce cortège parmi les 15.000 qui exercent en France ? Combien oseront venir se présenter à cette cérémonie ? Il y a quelques années, grâce à un ami industriel, Jacques avait lancé un appel par mailing postal en sollicitant d'eux une aide matérielle. Il leur avait suggéré de lui adresser .. le prix d'une consultation. La mailing avait été adressé à chacun d'entre eux. Je me souviens du dialogue téléphonique avec Jacques.

- Sais-tu combien ont répondu ?
- Non...
- Trois.

29 novembre 2004 :


Tout cela n'était pas éclairci. Maintenant, ça l'est.

Eh oui, on applaudit quand passe le funambule. Mis au courant des ses difficultés on verse des larmes de crocodile, ou on se gausse, on lève les yeux au ciel et on prend l'air important. Mais quand il s'agit de mettre la main au porte-feuille pour appuyer une démarche courageuse c'est une autre paire de manches. Et quand le funambule s'écrase au sol, on jette de la sciure sur la piste, on passe au numéro suivant du Grand Cirque Scientifique.

Le polytechnicien Philippe Lazar, directeur de l'Inserm de 1982 à 1996, qui ferma son laboratoire de la rue des Carnets, à Clamart en 1995 en le contraignant à camper pendant les dernières années qui lui restaient à vivre dans la cour, dans des baraquements Algeco, viendra-t-il aussi s'incliner "devant la dépouille mortelle" d'un homme qu'il aura été un des premiers à abattre ?

Il y a quelques jours je discutai avec un grand professeur en faculté de pharmacie. Un homme très intelligent, très sympathique et chaleureux. Je dirais même très ouvert. La question de l'eau est venue sur le tapis. Toujours cette question des "ponts hydrogène. Il me disait :

- Dans la glace, ce sont ces ponts qui crée cette structure. La seule énergie qui subsiste se présente alors principalement, je dirais quasi exclusivement sous forme vibratoire. Ces molécules, tenues entre elles par ces ponts, peuvent vibrer. Mais quand la température s'élève, cette structure se disloque. Des molécules d'eau, revenues à l'état libre, se mettent à tourner sur elles-mêmes, mais "pas toutes". Dans l'eau à l'état liquide ce sont des paquets de molécules qui restent liées entre elles par ces ponts, de moins en moins nombreux, jusqu'à ce que le passage à l'état de vapeur les fasse disparaître complètement. Cela a fait dire à certains que l'eau était un "quasi solide".



- Autrement dit, l'eau liquide est constitués par ces sortes de mini-cristaux de glace. Des "quasi-molécules" ?
- On peut le dire comme ça.
- Des mini-cristaux, constitués par combien de molécules d'eau fixées ensemble ?
- Ca, on n'en sait rien.
- Mais est-ce qu'on en a une idée ? Ce sont cent, mille, un millions de molécules qui forment ces agrégats solides ?
- On ne sait pas.
- Il y a quelque chose de mesurable ?
- Non.
- Si je comprends bien, l'état liquide de l'eau reste un modèle totalement spéculatif. En fait, on ne sait rien.
- Mais ce sont quand même les ponts hydrogène qui assurent la cohésion de ces sous-ensembles.
- Oui, mais vous ne savez ni combien de molécules s'assemblent pour former ces "polymères d'eau", ni quelle est leur structure.
- C'est un fait....
- En conclusion on ignore pratiquement tout de la structure du fluide le plus important de tout l'univers puisqu'il est le ciment même de la vie.
- Mais ce sont quand même les ponts hydrogène.
- Comme c'est étrange, comme c'est bizarre et quelle coincidence....

Jacques est mort. En France, c'est trop tard. C'est toujours trop tard. Si ses idées se développent, ça sera un jour ailleurs, dans un autre pays, comme d'habitude. Ici, personne ne reprendra ces travaux. Son administration (recherche médicale française) fera disparaître avec indifférence les baraquements Algeco vétustes, restes de ce "dernier carré de la recherche", qui encombrent encore la cour de l'unité Inserm 200 et où Jacques se sera accroché dix ans de manière ... totalement déraisonable.

Il n'y avait pas plus de deux cent personnes à l'enterrement, au cimetière du Père Lachaise, entre autre parce que le Monde n'avais pas mentionné le lieu, la date et l'heure de son inhumation. Certains fidèles, parents, amis, anciens collaborateurs, lurent des textes, la voix souvent brisée par l'émotion.

Testard, dont le laboratoire, intégré à l'INSERM 200 de Clamart, dans la cour duquel Benveniste avait installé ses Algeco travaillait à dix mètres de clui-ci. N'étant pas présent à l'enterrement il a fait lire un texte où il a admis qu'il avait négligé son ami et voisin dans la détresse. Il convenait, mais un peu tard, qu'il aurait pu aider son voisin et ami, simplement en se faisant le témoin des expériences tentées par Jacques, lequel l'avait maintes fois sollicité.

Je suis venu saluer un frère d'arme, la gorge nouée. Je savais que les choses se termineraient ainsi, même si cette opération chirurgicale avait été un succès. Quand on est à ce point contré par ses collègues et matériellement abandonné par ce que Jacques appelait "le Léviathan scientifique" on n'a que deux options : abandonner ou s'épuiser jusqu'à en mourir. Moi j'ai abandonné à plusieurs reprises après avoir mené des combats empreints de la même "déraison", des sortes de barouds d'honneur menés en solitaire, et c'est la raison pour laquelle, sans doute, je suis encore vivant. Jacques avait refusé de s'avouer vaincu et croyait encore à l'honnêteté et à la rationalité du monde scientifique. Une option à risque.

Avant sa mise en terre nous avons pu prendre connaissance de différents communiqués publiés dans la presse. A quelques exceptions près la teneur est la même. On commence par rappeler un début de carrière très brillant, "scientifiquement correct", passant par la découverte par ce médecin de formation, devenu chercheur à l'Inserm, d'une molécule, le PAF-acether (ou Platelet activating factor), jouant un rôle important dans les mécanismes immunitaires. Le reste est décrit comme une dérive. On évoque la descente effectuée en 1988 par l'illusionniste Randi, à la demande de la revue Nature, pour tenter de "démasquer la mystification". Peu de temps avant John Maddox, rédacteur en chef de cette revue scientifique, qui avait accepté de publier l'article, avait demandé à Benveniste de le retirer, ce que celui-ci avait refusé. Le Monde commente cette opération scandaleuse, mais ne la dénonce pas :

- Même si le piège échoue, l'objectif est atteint : le chercheur, ses résultats et l'ensemble de son approche sont discrédités. Refusant, non sans courage et panache, d'abandonner ses recherches, Benveniste affichera une arrongance et une morgue envers l'institution scientifique, qui ne cherchera alors ni à le comprendre, ni encore moins à lui pardonner.

Le journaliste oublie de mentionner que cette "institution scientifique" laissera ce chercheur dans un état d'abandon matériel total pendant dix ans, jusqu'à sa mort par épuisement, alors que l'eau constitue une réel problème, à la fois en biologie comme tout simplement en chimie, alors que la substance la plus présente dans les phénomènes qui sont à l'oeuvre à la surface de la Terre est aussi la plus mal connue.

Citant Philippe Lazar, supérieur hiérarchique de Benveniste, reponsable de la fermeture de son laboratoire de l'Inserm en 1995 le journal Le Monde écrit, je cite :

Philippe Lazar, polytechnicien, directeur général de l'Inserm de 1982 à 1996 et qui dit "être un ami de longue date" du chercheur, voit, avant tout en Jacques Benveniste un chercheur de premier plan qui est resté honnête mais qui a été victime d'une ténébreuse affaire. Il estime que l'homme "a fait preuve d'une insuffisance manifeste d'esprit critique dans l'interprétation de ses résultats". "Le phénomène qu'il avait constaté, juge-t-il, pouvait avoir une autre cause que la dilution des substances étudiées, par exemple la contamination répétitive de tube à tube".

Larousse : Ténèbres, obscurité profonde, ingnorance, incertitude, empire du démon. Ténébreux : plongé dans les ténèbres, secret et perfide, qui s'exprime en termes obscurs.

Voilà, sans preuves à l'appui, exprimé selon une simple opinion le qualificatif qui balaye d'un revers de main dix ans d'efforts insensés et dommageables, d'un chemin de croix atroce, qui s'est terminé par la mort :

L'abandon ou le cercueil.

Ce qui a tué Benveniste ça n'est pas la maladie, c'est l'irrationalité et l'indifférence, le refus de voir prendre en charge, avec des moyens très modestes, des problèmes authentiquement scientifiques et évidents, touchant à la fois à la biologie et à la physique (mais constituant une menace évidente, à terme, pour la grosse industrie pharmaceutique).

Cachez cette recherche que je ne saurais voir.

Où était par ailleurs le jour de l'enterrement "cet ami de longue date", qui prononça la fermeture du labo de Benveniste en 1995 ? Pourquoi cet ancien supérieur hiérarchique du chercheur, s'il était, comme Chevênement, retenu ce jour-là par des tâches liées à ses fonctions, n'a-t-il pas confié à l'un de ses subordonnés ou à un collègue présent le soin de lire quelques mots devant la dépouille mortelle de son "ami". Ces mots, qu'il a confié aux journalistes du Monde, pourquoi n'est-il pas venu les prononcer à voix haute le jour de l'enterrement, devant son cercueil ?

Je voudrais que ceux qui me lisent fassent une simple démarche, purement symbolique. Au lieu de verser une larme électronique en réagissant par un clic de souris, faites un geste simple. Procurez-vous une envelope, un timbre, une feuille de papier et écrivez une dernière lettre adressée au


Laboratoire de Biologie Numérique, 32 rue des Carnets, 94140 Clamart




A l'intérieur, consignez vos réactions vis à vis de la mort du professeur Benveniste. On alors, mettez simplement
Adieu, Jacques
                                                                         et vous signez

En date du 11 octobre 2004, huit jours après la mise ne place de cette page, 8400 personnes l'ont consulté. Le labo de biologie numérique a reçu un peu plus de quatre vingt lettres, ce qui correspond au taux " standard " de réponse des gens consultant mon site, tous sujets confondus et qui est de 1 % . Je conjecture qu'au fil des mois ce pourcentage se maintiendra. C'est comme ça .....

Je le répète : ce qui a tué Jacques Benveniste, ça n'est pas la maladie, c'est l'indifférence



Hommage du professeur Montagnier, 3 ans après sa mort, lors d'un colloge de virologie à Lugano, 2007

( 6 nov 2008 ) Lien

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