mercredi 28 janvier 2015

Etre ou ne pas Etre - To Be or not to Be

Dans ce monologue, Hamlet délibère pour savoir si la vie vaut la peine d'être vécue. Il ne sait s'il doit croire les propos du fantôme, et hésite à agir et à venger son père (si c'est bien lui). Cette hésitation à agir s'élargit à la question de vivre: cela vaut-il la peine? Ne vaut-il pas mieux mourir, ne pas être? Mais un élément nouveau intervient dans sa délibération: peut-être l'homme n'a-t-il pas le choix entre être et ne pas être, vivre et mourir, mais entre être (sur terre) et être (après la mort, devant le jugement de Dieu). Dans ce cas, en mettant un terme à sa vie, l'homme risque de rater son but, ne pas être, et de se retrouver dans l'Au-Delà, face à un juge terrible, qui est justement l'Etre Suprême. Dans ce cas, dit-il, il vaut encore mieux rester vivant sur terre, de peur de souffrir encore davantage dans l'Au-Delà.


To be, or not to be, that is the question—
Whether 'tis Nobler in the mind to suffer
The Slings and Arrows of outrageous Fortune,
Or to take Arms against a Sea of troubles,
And by opposing, end them? To die, to sleep—
No more; and by a sleep, to say we end
The Heart-ache, and the thousand Natural shocks
That Flesh is heir to? 'Tis a consummation
Devoutly to be wished. To die, to sleep,
To sleep, perchance to Dream; Aye, there's the rub,
For in that sleep of death, what dreams may come,
When we have shuffled off this mortal coil,
Must give us pause. There's the respect
That makes Calamity of so long life:
For who would bear the Whips and Scorns of time,
The Oppressor's wrong, the proud man's Contumely,
The pangs of despised Love, the Law’s delay,
The insolence of Office, and the Spurns
That patient merit of the unworthy takes,
When he himself might his Quietus make
With a bare Bodkin? Who would these Fardels bear,
To grunt and sweat under a weary life,
But that the dread of something after death,
The undiscovered Country, from whose bourn
No Traveller returns, Puzzles the will,
And makes us rather bear those ills we have,
Than fly to others that we know not of.
Thus Conscience does make Cowards of us all,
And thus the Native hue of Resolution
Is sicklied o'er, with the pale cast of Thought,
And enterprises of great pitch and moment,
With this regard their Currents turn awry,
And lose the name of Action. Soft you now,
The fair Ophelia. Nymph, in all thy Orisons
Be thou all my sins remembered.[4]


First Quarto (1603)

The first edition of Hamlet in print was the 1603 "First Quarto" which some have argued represents a bad quarto (essentially, a theatrical knock-off) rather than a first draft or touring copy of Shakespeare's script. This has a shorter version of the speech. For ease of comparison the spelling here is updated as above.
To be, or not to be, aye there's the point,
To Die, to sleep, is that all? Aye all:
No, to sleep, to dream, aye marry there it goes,
For in that dream of death, when we awake,
And borne before an everlasting Judge,
From whence no passenger ever returned,
The undiscovered country, at whose sight
The happy smile, and the accursed damn'd.
But for this, the joyful hope of this,
Who'd bear the scorns and flattery of the world,
Scorned by the right rich, the rich cursed of the poor?
The widow being oppressed, the orphan wrong'd,
The taste of hunger, or a tyrants reign,
And thousand more calamities besides,
To grunt and sweat under this weary life,
When that he may his full Quietus make,
With a bare bodkin, who would this endure,
But for a hope of something after death?
Which puzzles the brain, and doth confound the sense,
Which makes us rather bear those evils we have,
Than fly to others that we know not of.
Aye that, O this conscience makes cowards of us all,
Lady in thy orizons, be all my sins remembered.[5][6]

dimanche 25 janvier 2015

les ames blessées


Germaine Sablon Le chant des partisans 1943


Quand l’idée du voile faisait éclater de rire des musulmans…



Le Caire, 1953. Nasser et son auditoire s’esclaffent devant cette revendication des Frères musulmans : « rendre obligatoire le port du voile ». Scène et propos devenus inimaginables aujourd’hui, y compris à Paris…

YAMAKAZI



samedi 24 janvier 2015

Conférence « De la nécessité de penser différemment pour être créateur d’innovation »



L’ANAJ-IHEDN a le plaisir de vous inviter à sa prochaine conférence sur le thème :
De la nécessité de penser différemment pour être créateur d’innovation
Benjamin DUPAYS
Président-Fondateur de Centiméo
Alexis FOGEL
Co-fondateur et directeur produit de Dashlane
Jéméry LAMRI
Président Directeur Général de Monkey Tie
David VISSIERE
Président Directeur Général de Sysnav
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Jeudi 22 janvier 2015
19h30 à 21h30
Ecole militaire
Amphithéâtre Des Vallières
_____
Qui a dit que la France ne tirait pas son épingle du jeu dans la course mondiale à l’innovation? Avec 12 groupes français parmi les 100 organisations les plus innovantes dans le monde, la France est 3ème, derrière les Etats-Unis et le Japon. L’Allemagne, le Royaume Uni et la Chine sont loin derrière.
Mais au delà des grands groupes, l’innovation en France passe également par les ETI, PME et les start-up. Elles sont de plus en plus actives, en France et à l’international. Les entreprises innovantes tricolores sont d’ailleurs présentes en force en janvier au salon Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas. Au milieu de grandes entreprises comme L’Oréal, Pernod Ricard ou La Poste, les start-up françaises, sous le Pavillon de la French Tech, sont présentes en nombre. Avec 120 entreprises dont 66 start-up, la France le pays le plus représenté en Europe, et le cinquième dans le monde, derrière la Chine, les États-Unis, Taïwan et la Corée du Sud.
A travers quatre exemples, l’ANAJ-IHEDN souhaite donner la parole aux représentants de ces jeunes entreprises françaises innovantes qui gagnent à être connues !
INSCRIPTIONS CLOSES
A propos des projets qui seront présentés …
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Centimeo exploite les pièces de 1, 2 et 5 centimes d’euros, qui sont largement inutilisées et coûte très cher à l’Etat, contraint d’en fabriquer près d’un milliard chaque année. Pour ce faire, Centiméo exploite des distributeurs de produits de grande consommation à l’unité, dans le but de les récupérer et de les réinsérer dans l’économie auprès des commerçants : il s’agit donc d’un modèle d’économie circulaire. Cette entreprise a par ailleurs vocation à créer de l’emploi d’insertion en fabricant eux-mêmes leurs bornes. A l’origine de cette création, une start-up de Montigny-le-Bretonneux créée par Benjamin Dupays, 23 ans, qui a signé dernièrement un accord avec de grandes entreprises pour cette implantation.
Pour en savoir plus : www.centimeo.fr
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DashlaneSur Internet, les mots de passe sont un mal nécessaire. Ils sont aujourd’hui le moyen privilégié pour protéger et accéder à nos informations personnelles. Difficile néanmoins de trouver la combinaison de chiffres et de lettres qui soit à la fois sûre et facile à retenir. C’est dans ce contexte généralisé que l’entreprise française Dashlane a lancé en 2012 une application pour ordinateur et mobile (sur PC, Mac, Android et iOS) destinée à simplifier la vie des internautes. Une fois installé, le programme enregistre automatiquement les pseudonymes et les mots de passe qui y sont associés pour tous les comptes de ses utilisateurs. La connexion à sa boîte mail ou à d’autres services en ligne se fait dès lors sans efforts.
Pour en savoir plus : www.dashlane.com
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Monkey Tie : Le recrutement en ligne fait face depuis trop longtemps à une triste réalité : d’un côté l’entreprise expose librement son besoin et ses attentes, et de l’autre côté le candidat expose dans un cadre contraint sa valeur ajoutée. On a ainsi une offre d’emploi face à un CV. Ce processus très asymétrique néglige l’importance des attentes et besoins des candidats, ainsi que l’importance des spécificités de l’entreprise. Chaque entreprise correspond mieux à certains profils qu’à d’autres, et la technologie permet aujourd’hui de prendre en compte cette réalité. Monkey tie est ainsi le premier site de recrutement affinitaire, prenant en compte la culture d’entreprise et la personnalité des candidats, en plus du CV. En intégrant des paramètres indispensables de la réussite d’un recrutement dès le début du processus, Monkey tie ambitionne de réduire l’importance du CV et des inégalités à l’embauche, tout en permettant à chacun de trouver l’entreprise qui lui correspond.
Pour en savoir plus : www.monkey-tie.com
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Sysnav : Avec une technologie révolutionnaire de géolocalisation sans GPS, la PME normande Sysnav a remporté en avril 2014 le prestigieux prix MIT Technology Review en la personne de son dirigeant David Vissière. Cette start-up développe des capteurs de géolocalisation qui fonctionnent sans GPS. Car, les systèmes à base de signaux radiofréquences sont très imprécis voire inutilisables en zones couvertes (centre commercial, bâtiment, parking, métro, forêt, etc). La solution de navigation de Sysnav se passe donc du GPS ; elle repose sur une centrale inertielle, dont le fonctionnement est similaire à celle que l’on trouve dans un avion de chasse par exemple, mais dont le principe physique a été repensé pour aboutir à une innovation de rupture.
Pour en savoir plus : www.sysnav.fr

Putain de barbares païns dégénérés !

Voilà comment on décapite une femme en Arabie saoudite

Décapitation en public en Arabie saoudite (Photo capture d'écran)
Décapitation en public en Arabie saoudite (Photo capture d’écran)
Des images, tournées discrètement en Arabie saoudite, montrent l’exécution en public d’une femme dans une rue de la Mecque, ou peut-être un parking. C’était lundi dernier.
Laila Bent Abdel Mouttalib Bassim, citoyenne birmane, vivait en Arabie saoudite. La justice du roi Abdallah l’a jugée coupable d’avoir sexuellement abusé de sa belle-fille de sept ans et de l’avoir tuée.
Dans la vidéo, on voit plusieurs policiers tenter de la maintenir à terre en pleine rue pour que le bourreau lui tranche la tête. Elle clame son innocence et hurle à l’injustice jusqu’à la fin. « Je n’ai pas tué, je n’ai pas tué, haram », hurle-t-elle.
« C’est une injustice, je n’ai pas tué », répète-t-elle à plusieurs reprises.
Puis, le bourreau, habillé en blanc comme à l’accoutumée dans ce pays, la frappe deux fois au cou avec son sabre. On entend un cri strident et les hurlements de la femme cessent dès le premier coup.
Puis, le bourreau se retourne et lui donne le dernier coup de grâce. On entend le fracassement du sabre sur le sol. La tête est sectionnée.
La besogne finie, il nettoie son sabre.
Au-delà du crime commis par cette femme, fallait-il l’exécuter de cette manière et en public ?
Après le massacre de la rédaction de Charlie Hebdo par deux fanatiques islamistes, cette exécution va ternir encore plus dans le monde l’image de islam et de ses suiveurs.

 

mardi 20 janvier 2015

Soins Mains Aura





vendredi 16 janvier 2015

Peut-on représenter le prophète Mahomet ?

Erick Cakpo, historien des religions

Tribune
Après l’attentat perpétré le 7 janvier, dans sa une du 14 janvier, le magazine satirique Charlie Hebdo publie un dessin du prophète Mahomet qui heurte la sensibilité religieuse de certains musulmans.

Une de Charlie Hebdo le 14 janvier 2015 
L’Iran qualifie l’acte d’« insultant », estimant que ce dessin « porte atteinte aux sentiments des musulmans ». Al-Azhar, principale autorité de l’islam sunnite basée en Egypte, a pour sa part estimé que cette publication est de nature à « attiser la haine » et appelle les musulmans à « ignorer » le numéro.

Des représentations du prophète dans le monde musulman

Making of
On finit par ne plus savoir : l’islam interdit-il vraiment les représentations du prophète ? D’où provient cette sensibilité si forte à ces images ? Nous avons reçu ce texte d’Erick Cakpo, qui enseigne l’histoire des religions à l’université de Lorraine. Une mise au point que nous publions volontiers.
Xavier de La Porte
Et pourtant, les musulmans eux-mêmes ont souvent représenté le prophète. On constate par exemple en Iran de nombreuses représentations en vente libre dans les souks. Il s’agit des portraits sur papier montrant Mahomet jeune coiffé d’un turban. C’est surtout chez les chiites, la seconde branche la plus importante de l’islam, que les images du prophète sont les plus répandues. Dans la plupart de ces représentations, Muhammad est généralement figuré avec des traits visibles ou bien avec un ovale vide ou encore une plage blanche en lieu et place du visage (procédé d’évitement de la figure qui se retrouve dans l’art juif).

Muhammad au visage voilé ; l’ange Gabriel se tient derrière lui. Miniature extraite de la version illustrée de la chronique Zubdet el-tevarikh réalisée au XVIe siècle pour le sultan ottoman Murad III (détail) (Istanbul, Musée des arts turcs et islamiques)
S’il existe des représentations du prophète même dans les milieux musulmans, pourquoi les dessins de Charlie Hebdo continuent-ils de choquer ?

Une interdiction non inscrite dans le Coran

L’islam se réclame d’une religion sans images. Mais contrairement à ce qu’on laisse croire, le Coran ne contient aucune condamnation formelle des représentations. C’est certainement pour cette raison que les chiites n’ont aucun scrupule à le faire.
L’interdiction générale de représenter les vivants est imposée après la mort de Mahomet, certainement dans le but de lutter contre l’idolâtrie. Il ne faut pas oublier que l’islam est né dans un contexte païen et que le retour vers le polythéisme constitue une hantise dans les premiers siècles de son développement.
De ce fait, les hadith, qui sont des textes rapportant les actes ou propos du prophète, vont servir de base pour instaurer la règle de la non-représentation du vivant. Par exemple, un passage du hadith avertit qu’au dernier jour, celui de la Résurrection et du Jugement dernier, celui qui se sera risqué à représenter des êtres vivants sera sommé par Dieu d’insuffler la vie à ces formes ; et comme il se mon­trera bien sûr incapable de relever le défi, il sera, pour l’éternité sans doute, la risée universelle.
Ainsi, très vite, la fabrication d’images fut considérée comme l’une des fautes les plus graves qui soit. Vers 695, sur les monnaies en usage dans le monde arabe, les portraits des souverains sont remplacés par des inscriptions à tendance abstraite. De même, en 721, le calife Yazid II (720-724) donne l’ordre d’enlever des bâtiments publics toute représentation d’être vivant, y compris à l’intérieur des églises. Mais au fil des siècles, et selon les espaces, l’interdit est de moins en moins respecté si bien qu’on assiste à des images de Mahomet dans les miniatures persanes et même sur des tapis.

Une miniature célèbre représentant Muhammad et les traits de son visage, extraite de l’ouvrage d’al-Bîrûnî, al-Âthâr al-bâqiya, Iran, XVIe siècle (Paris, BNF, manuscrits orientaux, Arabe 1489, fol. 5v)
De son vivant, le prophète a parfois montré l’exemple de la tolérance à exercer envers certaines images. On en veut pour preuve ce passage rapporté par l’éminent théologien, islamologue et universitaire qatari d’origine égyptienne Yûsuf Al-Qaradâwî :
« Dans la plus ancienne des chroniques consacrées à l’histoire de La Mecque qui nous soit parvenue, l’auteur [...] rapporte un fait d’une importance historique considérable [...]. Après l’entrée triomphale des troupes musulmanes dans La Mecque, le Prophète pénétra dans l’édifice cubique de la Kaaba, que lui et ses compagnons trou­vèrent couverte de peintures. Le Prophète donna l’ordre de les effacer à l’exception de l’une d’elles, exécutée sur un pilier, qui représentait Marie et Jésus. Un tel geste s’explique fort naturellement par le respect qui entoure Marie dans l’islam. Une sourate entière, qui porte son nom (sour. XIX) lui est consacrée dans le Coran. Jésus, l’avant-dernier prophète avant Muhammad, est lui-même l’objet d’une véritable vénération [...]. Mais le geste du Prophète démontre aussi que la présence d’une image figurative, fût-ce d’une icône de la “Vierge à l’Enfant”, n’avait rien de scandaleux à ses yeux5 . »

Une confusion de base

Alors pourquoi autant de tensions depuis l’affaire des caricatures de Mahomet (septembre 2005) à laquelle a pris part Charlie Hebdo ?
Il y a une confusion qu’il faut relever. Pour beaucoup de musulmans, surtout les sunnites (la branche la plus importante), chez qui la règle de non-représentation des êtres est plus respectée, c’est la simple représentation du prophète qui pose problème. « On n’a pas le droit de représenter le prophète », a t-on souvent entendu. Ce qui veut dire que les représentations non satiriques mêmes posent problème et sont considérées par certaines personnes de confession musulmane comme un blasphème.
Aux yeux des musulmans, le prophète bénéficie d’un caractère sacré si bien qu’une atteinte à son image est jugée irrévérencieuse. Dans ce cas, protester de manière légale contre les représentations du prophète à caractère outrageux est légitime au nom de la liberté de conscience. Mais dans les cas de représentations non caustiques de Mahomet comme cela semble le cas avec la dernière une de Charlie Hebdo, pourquoi autant de remous ? Dans quelle mesure les préceptes de l’islam s’appliquent-ils à d’autres qui ne se réclament pas de cette confession ?
Dans les milieux musulmans français, beaucoup de voix se lèvent actuellement pour appeler à la distinction de ce qui relève des règles religieuses qui ne concernent que les adeptes et ce qui appartient au droit français. Dans l’affaire des caricatures du prophète, il est légitime de se demander jusqu’où peut aller la liberté d’expression. Sauf en Alsace et Moselle, le droit français ne reconnaît pas le blasphème, mais il condamne l’incitation à la haine ou à la violence en raison de la religion (art. 24), ou la diffamation contre un groupe religieux (art. 32). Où est la limite ?

jeudi 15 janvier 2015

Dialectique du Moi et de l'inconscient

L'impossibilité ou le refus de voir l'individuel, dont on ne perçoit même plus l'existence, équivaut tout simplement à étouffer l'individu, ce qui détruit au sein d'un groupe social les éléments de différenciation. Car c'est l'individu qui est par excellence le facteur de différenciation. Les plus grandes vertus, les créations les plus sublimes, comme aussi les pires défauts et les pires atrocités, sont individuels.
Plus une communauté est nombreuse, plus la sommation des facteurs collectifs, qui est inhérente à la masse, se trouve accentué au détriment de l'individu par le jeu des préjugés conservateurs ; plus aussi l'individu se sent moralement et spirituellement anéanti, ce qui tarit ainsi la seule source possible du progrès moral et spirituel d'une société [...]. Tout ce qu'il y a d'individuel en lui est condamné à sombrer, c'est-à-dire à être refoulé. De ce fait tous les facteurs individuels deviendront inconscients, tomberont dans l'inconscient ; ils y végéteront et s'y transformeront selon une loi implacable en une manière de négativité systématique, de malignité principielle, qui se manifestent en impulsions destructrices et en comportements anarchiques. Ces tendances deviendront agissantes sur le plan social, chez l'individu tout d'abord : certains sujets à tempérament prohétique deviennent l'instrument de crimes à sensation (meurtre de roi, etc.) ; mais elles se font sentir chez tous de façon indirecte, à l'arrière-plan, par une décadence morale inévitable de la société.
Dialectique du Moi et de l'inconscient (1933), Carl Gustav Jung (trad. Docteur Roland Cahen), éd. Gallimard, coll. Folio Essais, 1964 (ISBN 2-07-032372-2), partie I. Des effets de l'inconscient sur le conscient, chap. II. Les conséquences de l'assimilation de l'inconscient, p. 73

samedi 10 janvier 2015

Défilé militaire en Thaïlande atypique





Ca montre une tres grande discipline et une cohérence exceptionelle entre les soldats

vendredi 9 janvier 2015

Lettre ouverte au monde musulman

Pour le philosophe Abdennour Bidar, les croyants ne peuvent pas se contenter de dénoncer la barbarie terroriste pour éluder l'origine des dérives djihadistes. Face aux dogmes et à l'instrumentalisation politique dont ils sont l'objet, le monde musulman doit faire son autocritique et œuvrer à sa propre réforme.


Le sommet d'une mosquée à Islamabad au Pakistan - Anjum Naveed/AP/SIPA
Le sommet d'une mosquée à Islamabad au Pakistan - Anjum Naveed/AP/SIPA


Lettre ouverte au monde musulman
>>> Tribune parue dans Marianne daté du 3 octobre

Cher monde musulman, je suis un de tes fils éloignés qui te regarde du dehors et de loin - de ce pays de France où tant de tes enfants vivent aujourd'hui. Je te regarde avec mes yeux sévères de philosophe nourri depuis son enfance par le 
taçawwuf (soufisme) et par la pensée occidentale. Je te regarde donc à partir de ma position de barzakh, d'isthme entre les deux mers de l'Orient et de l'Occident !

Et qu'est-ce que je vois ? Qu'est-ce que je vois mieux que d'autres, sans doute parce que justement je te regarde de loin, avec le recul de la distance ? Je te vois, toi, dans un état de misère et de souffrance qui me rend infiniment triste, mais qui rend encore plus sévère mon jugement de philosophe ! Car je te vois en train d'enfanter un monstre qui prétend se nommer Etat islamique et auquel certains préfèrent donner un nom de démon : Daesh. Mais le pire est que je te vois te perdre - perdre ton temps et ton honneur - dans le refus de reconnaître que ce monstre est né de toi, de tes errances, de tes contradictions, de ton écartèlement entre passé et présent, de ton incapacité trop durable à trouver ta place dans la civilisation humaine.

Que dis-tu en effet face à ce monstre ? Tu cries : « Ce n'est pas moi ! »« Ce n'est pas l'islam ! » Tu refuses que les crimes de ce monstre soient commis en ton nom (#NotInMyName). Tu t'insurges que le monstre usurpe ton identité, et bien sûr tu as raison de le faire. Il est indispensable qu'à la face du monde tu proclames ainsi, haut et fort, que l'islam dénonce la barbarie. Mais c'est tout à fait insuffisant ! Car tu te réfugies dans le réflexe de l'autodéfense sans assumer aussi et surtout la responsabilité de l'autocritique. Tu te contentes de t'indigner alors que ce moment aurait été une occasion historique de te remettre en question ! Et tu accuses au lieu de prendre ta propre responsabilité : « Arrêtez, vous, les Occidentaux, et vous, tous les ennemis de l'islam, de nous associer à ce monstre ! Le terrorisme, ce n'est pas l'islam, le vrai islam, le bon islam qui ne veut pas dire la guerre mais la paix ! »

J'entends ce cri de révolte qui monte en toi, ô mon cher monde musulman, et je le comprends. Oui, tu as raison, comme chacune des autres grandes inspirations sacrées du monde, l'islam a créé tout au long de son histoire de la beauté, de la justice, du sens, du bien, et il a puissamment éclairé l'être humain sur le chemin du mystère de l'existence... Je me bats ici, en Occident, dans chacun de mes livres, pour que cette sagesse de l'islam et de toutes les religions ne soit pas oubliée ni méprisée ! Mais de ma position lointaine je vois aussi autre chose que tu ne sais pas voir... Et cela m'inspire une question - « la » grande question : pourquoi ce monstre t'a-t-il volé ton visage ? Pourquoi ce monstre ignoble a-t-il choisi ton visage et pas un autre ? C'est qu'en réalité derrière ce monstre se cache un immense problème, que tu ne sembles pas prêt à regarder en face. Il faudra bien pourtant que tu finisses par en avoir le courage.

Ce problème est celui des racines du mal. D'où viennent les crimes de ce soi-disant « Etat islamique » ? Je vais te le dire, mon ami. Et cela ne va pas te faire plaisir, mais c'est mon devoir de philosophe. Les racines de ce mal qui te vole aujourd'hui ton visage sont en toi-même, le monstre est sorti de ton propre ventre - et il en surgira autant d'autres monstres pires encore que celui-ci que tu tarderas à admettre ta maladie, pour attaquer enfin cette racine du mal !

Même les intellectuels occidentaux ont de la difficulté à le voir : pour la plupart, ils ont tellement oublié ce qu'est la puissance de la religion - en bien et en mal, sur la vie et sur la mort - qu'ils me disent : « Non, le problème du monde musulman n'est pas l'islam, pas la religion, mais la politique, l'histoire, l'économie, etc. » Ils ne se souviennent plus du tout que la religion peut être le cœur de réacteur d'une civilisation humaine ! Et que l'avenir de l'humanité passera demain non pas seulement par la résolution de la crise financière, mais de façon bien plus essentielle par la résolution de la crise spirituelle sans précédent que traverse notre humanité tout entière ! Saurons-nous tous nous rassembler, à l'échelle de la planète, pour affronter ce défi fondamental ? La nature spirituelle de l'homme a horreur du vide, et si elle ne trouve rien de nouveau pour le remplir elle le fera demain avec des religions toujours plus inadaptées au présent - et qui comme l'islam actuellement se mettront alors à produire des monstres.

Je vois en toi, ô monde musulman, des forces immenses prêtes à se lever pour contribuer à cet effort mondial de trouver une vie spirituelle pour le XXIe siècle ! Malgré la gravité de ta maladie, il y a en toi une multitude extraordinaire de femmes et d'hommes qui sont prêts à réformer l'islam, à réinventer son génie au-delà de ses formes historiques et à participer ainsi au renouvellement complet du rapport que l'humanité entretenait jusque-là avec ses dieux ! C'est à tous ceux-là, musulmans et non-musulmans, qui rêvent ensemble de révolution spirituelle, que je me suis adressé dans mes ouvrages ! Pour leur donner, avec mes mots de philosophe, confiance en ce qu'entrevoit leur espérance !

Mais ces musulmanes et ces musulmans qui regardent vers l'avenir ne sont pas encore assez nombreux, ni leur parole, assez puissante. Tous ceux-là, dont je salue la lucidité et le courage, ont parfaitement vu que c'est l'état général de maladie profonde du monde musulman qui explique la naissance des monstres terroristes aux noms d'Al-Qaïda, Jabhat Al-Nosra, Aqmi ou « Etat islamique ». Ils ont bien compris que ce ne sont là que les symptômes les plus visibles sur un immense corps malade, dont les maladies chroniques sont les suivantes : impuissance à instituer des démocraties durables dans lesquelles est reconnue comme droit moral et politique la liberté de conscience vis-à-vis des dogmes de la religion ; difficultés chroniques à améliorer la condition des femmes dans le sens de l'égalité, de la responsabilité et de la liberté ; impuissance à séparer suffisamment le pouvoir politique de son contrôle par l'autorité de la religion ; incapacité à instituer un respect, une tolérance et une véritable reconnaissance du pluralisme religieux et des minorités religieuses.

Tout cela serait-il donc la faute de l'Occident ? Combien de temps précieux vas-tu perdre encore, ô cher monde musulman, avec cette accusation stupide à laquelle toi-même tu ne crois plus, et derrière laquelle tu te caches pour continuer à te mentir à toi-même ?

Depuis le XVIIIe siècle en particulier, il est temps de te l'avouer, tu as été incapable de répondre au défi de l'Occident. Soit tu t'es réfugié de façon infantile et mortifère dans le passé, avec la régression obscurantiste du wahhabisme qui continue de faire des ravages presque partout à l'intérieur de tes frontières - un wahhabisme que tu répands à partir de tes Lieux saints de l'Arabie saoudite comme un cancer qui partirait de ton cœur lui-même ! Soit tu as suivi le pire de cet Occident, en produisant comme lui des nationalismes et un modernisme qui est une caricature de modernité - je veux parler notamment de ce développement technologique sans cohérence avec leur archaïsme religieux qui fait de tes « élites » richissimes du Golfe seulement des victimes consentantes de la maladie mondiale qu'est le culte du dieu Argent.

Qu'as-tu d'admirable aujourd'hui, mon ami ? Qu'est-ce qui en toi reste digne de susciter le respect des autres peuples et civilisations de la Terre ? Où sont tes sages, et as-tu encore une sagesse à proposer au monde ? Où sont tes grands hommes ? Qui sont tes Mandela, qui sont tes Gandhi, qui sont tes Aung San Suu Kyi ? Où sont tes grands penseurs dont les livres devraient être lus dans le monde entier comme au temps où les mathématiciens et les philosophes arabes ou persans faisaient référence de l'Inde à l'Espagne ? En réalité, tu es devenu si faible derrière la certitude que tu affiches toujours au sujet de toi-même... Tu ne sais plus du tout qui tu es, ni où tu veux aller, et cela te rend aussi malheureux qu'agressif... Tu t'obstines à ne pas écouter ceux qui t'appellent à changer en te libérant enfin de la domination que tu as offerte à la religion sur la vie tout entière.

Tu as choisi de considérer que Mohammed était prophète et roi. Tu as choisi de définir l'islam comme religion politique, sociale, morale, devant régner comme un tyran aussi bien sur l'Etat que sur la vie civile, aussi bien dans la rue et dans la maison qu'à l'intérieur même de chaque conscience. Tu as choisi de croire et d'imposer que l'islam veut dire soumission alors que le Coran lui-même proclame qu'« il n'y a pas de contrainte en religion » (La ikraha fi Dîn). Tu as fait de son appel à la liberté l'empire de la contrainte ! Comment une civilisation peut-elle trahir à ce point son propre texte sacré ? Je dis qu'il est l'heure, dans la civilisation de l'islam, d'instituer cette liberté spirituelle - la plus sublime et difficile de toutes - à la place de toutes les lois inventées par des générations de théologiens !

De nombreuses voix que tu ne veux pas entendre s'élèvent aujourd'hui dans la Oumma pour dénoncer ce tabou d'une religion autoritaire et indiscutable... Au point que trop de croyants ont tellement intériorisé une culture de la soumission à la tradition et aux « maîtres de religion » (imams, muftis, chouyoukhs, etc.) qu'ils ne comprennent même pas qu'on leur parle de liberté spirituelle, ni qu'on leur parle de choix personnel vis-à-vis des « piliers » de l'islam. Tout cela constitue pour eux une « ligne rouge » si sacrée qu'ils n'osent pas donner à leur propre conscience le droit de la remettre en question ! Et il y a tant de familles où cette confusion entre spiritualité et servitude est incrustée dans les esprits dès le plus jeune âge et où l'éducation spirituelle est d'une telle pauvreté que tout ce qui concerne la religion reste quelque chose qui ne se discute pas !

Or, cela, de toute évidence, n'est pas imposé par le terrorisme de quelques troupes de fous fanatiques embarqués par l'« Etat islamique ». Non, ce problème-là est infiniment plus profond ! Mais qui veut l'entendre ? Silence là-dessus dans le monde musulman, et dans les médias occidentaux on n'écoute plus que tous ces spécialistes du terrorisme qui aggravent jour après jour la myopie générale ! Il ne faut donc pas que tu t'illusionnes, ô mon ami, en faisant croire que, quand on en aura fini avec le terrorisme islamiste, l'islam aura réglé ses problèmes ! Car tout ce que je viens d'évoquer - une religion tyrannique, dogmatique, littéraliste, formaliste, machiste, conservatrice, régressive - est trop souvent l'islam ordinaire, l'islam quotidien, qui souffre et fait souffrir trop de consciences, l'islam du passé dépassé, l'islam déformé par tous ceux qui l'instrumentalisent politiquement, l'islam qui finit encore et toujours par étouffer les Printemps arabes et la voix de toutes ses jeunesses qui demandent autre chose. Quand donc vas-tu faire enfin cette révolution qui dans les sociétés et les consciences fera rimer définitivement spiritualité et liberté ?

Bien sûr, dans ton immense territoire il y a des îlots de liberté spirituelle : des familles qui transmettent un islam de tolérance, de choix personnel, d'approfondissement spirituel ; des lieux où l'islam donne encore le meilleur de lui-même, une culture du partage, de l'honneur, de la recherche du savoir, et une spiritualité en quête de ce lieu sacré où l'être humain et la réalité ultime qu'on appelle Allâh se rencontrent. Il y a en terre d'Islam, et partout dans les communautés musulmanes du monde, des consciences fortes et libres. Mais elles restent condamnées à vivre leur liberté sans reconnaissance d'un véritable droit, à leurs risques et périls face au contrôle communautaire ou même parfois face à la police religieuse. Jamais pour l'instant le droit de dire « Je choisis mon islam »« J'ai mon propre rapport à l'islam » n'a été reconnu par l'« islam officiel » des dignitaires. Ceux-là, au contraire, s'acharnent à imposer que « la doctrine de l'islam est unique » et que « l'obéissance aux piliers de l'islam est la seule voie droite » (sirâtou-l-moustaqîm).

Ce refus du droit à la liberté vis-à-vis de la religion est l'une de ces racines du mal dont tu souffres, ô mon cher monde musulman, l'un de ces ventres obscurs où grandissent les monstres que tu fais bondir depuis quelques années au visage effrayé du monde entier. Car cette religion de fer impose à tes sociétés tout entières une violence insoutenable. Elle enferme toujours trop de tes filles et tous tes fils dans la cage d'un bien et d'un mal, d'un licite (halâl) et d'un illicite (harâm) que personne ne choisit mais que tout le monde subit. Elle emprisonne les volontés, elle conditionne les esprits, elle empêche ou entrave tout choix de vie personnel. Dans trop de tes contrées, tu associes encore la religion et la violence - contre les femmes, les « mauvais croyants », les minorités chrétiennes ou autres, les penseurs et les esprits libres, les rebelles - de sorte que cette religion et cette violence finissent par se confondre, chez les plus déséquilibrés et les plus fragiles de tes fils, dans la monstruosité du djihad !

Alors ne fais plus semblant de t'étonner, je t'en prie, que des démons tels que le soi-disant Etat islamique t'aient pris ton visage ! Les monstres et les démons ne volent que les visages qui sont déjà déformés par trop de grimaces ! Et si tu veux savoir comment ne plus enfanter de tels monstres, je vais te le dire. C'est simple et très difficile à la fois. Il faut que tu commences par réformer toute l'éducation que tu donnes à tes enfants, dans chacune de tes écoles, chacun de tes lieux de savoir et de pouvoir. Que tu les réformes pour les diriger selon des principes universels (même si tu n'es pas le seul à les transgresser ou à persister dans leur ignorance) : la liberté de conscience, la démocratie, la tolérance et le droit de cité pour toute la diversité des visions du monde et des croyances, l'égalité des sexes et l'émancipation des femmes de toute tutelle masculine, la réflexion et la culture critique du religieux dans les universités, la littérature, les médias. Tu ne peux plus reculer, tu ne peux plus faire moins que tout cela ! C'est le seul moyen pour toi de ne plus enfanter de tels monstres, et si tu ne le fais pas, tu seras bientôt dévasté par leur puissance de destruction.

Cher monde musulman... Je ne suis qu'un philosophe, et comme d'habitude certains diront que le philosophe est un hérétique. Je ne cherche pourtant qu'à faire resplendir à nouveau la lumière - c'est le nom que tu m'as donné qui me le commande, Abdennour, « Serviteur de la Lumière ». Je n'aurais pas été si sévère dans cette lettre si je ne croyais pas en toi. Comme on dit en français, « qui aime bien châtie bien ». Et, au contraire, tous ceux qui aujourd'hui ne sont pas assez sévères avec toi - qui veulent faire de toi une victime -, tous ceux-là en réalité ne te rendent pas service ! Je crois en toi, je crois en ta contribution à faire demain de notre planète un univers à la fois plus humain et plus spirituel ! Salâm, que la paix soit sur toi.

 
Abdennour Bidar est philosophe, auteur de Self islam, histoire d'un islam personnel (Seuil, 2006), L'Islam sans soumission : pour un existentialisme musulman (Albin Michel, 2008), et d' Histoire de l'humanisme en Occident (Armand Colin, 2014).

توقف



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Le Vrai Djihad



«Nous sommes l’unique bouclier humaniste face à la barbarie»


Kurdistan
Entretien réalisé par 
Stéphane Aubouard
Lundi, 6 Octobre, 2014
L'Humanité
Gharib Hassou est le représentant du PYD syrien au Kurdistan irakien, la principale force de résistance kurde de Syrie. Il accuse la Turquie d’appuyer militairement « l’État islamique » (« EI ») et d’acheter du pétrole aux djihadistes, organisés selon lui en véritable « mafia ».
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AFP

Erbil (Kurdistan irakien), envoyé spécial. Pourquoi la prise de Kobané est-elle un enjeu si important pour « l’État islamique » ?
GHARIB HASSOU La situation de la ville de Kobané est stratégique. Si Daesh (« EI ») venait à la prendre, cela séparerait les deux autres cantons kurdes syriens d’Afrin et de Djeziré, ce qui affaiblirait notre résistance tout en élargissant leurs propres frontières. Mais au-delà de l’aspect stratégique, il y a aussi un aspect symbolique, car c’est à Kobané en 2012 que nous avons commencé la révolution. Daesh veut aussi saper le moral des Kurdes syriens en s’emparant de ce symbole fort. Depuis un an, ils ont tenté à dix reprises de prendre la ville et à chaque fois, avec nos seules forces armées, nous avons réussi à les repousser. Le problème, c’est qu’aujourd’hui leur puissance de feu, depuis qu’ils ont pris des chars et des armes lourdes à l’armée irakienne, est bien plus importante. Et puis il y a des forces obscures… des États, qui aident franchement les djihadistes dans leur conquête.
Vous pensez à la Turquie ?
GHARIB HASSOU Ce sont des aides directes, et je parle bien de la Turquie. Joe Biden (le chef de la diplomatie américaine – NDLR) vient d’ailleurs de le confirmer sur le plan financier. Non seulement Ankara a aidé récemment Daesh militairement, mais l’apport financier de la Turquie est très important. Il y a des accords directs avec Daesh, qui fonctionne comme une mafia avec l’argent qu’on lui donne. Cet argent, c’est notamment celui du pétrole que les djihadistes contrôlent tout au long de la frontière et vendent à la Turquie (on parle d’un prix du baril à 40 dollars au lieu du prix actuel de 100 dollars). C’est la Turquie qui aujourd’hui tire les ficelles dans la région, et puis d’un autre côté elle parle de venir rejoindre la coalition…
Mais le Parlement turc vient de voter pour une intervention, sinon militaire, au moins manitaire, pour aider la ville de Kobané…
GHARIB HASSOU Je n’y crois pas une seconde. Cela fait des millénaires que les Turcs combattent les Kurdes donc ils ont choisi qui était leur ennemi. Et ce n’est pas Daesh. En vérité la Turquie ne veut pas d’un État démocratique dans notre région, mais d’un État islamique. Erdogan est un islamiste. Aussi faut-il que les Occidentaux sachent que cette guerre, dans laquelle nous sommes les seuls (YPG, Kurdes syriens, et PKK, Kurdes de Turquie) à combattre sur le terrain, les concerne autant que nous. Nous sommes l’unique bouclier fraternel, humaniste, face à la barbarie. Nous sommes le seul peuple de la région à être organisé démocratiquement. Chez nous, c’est le peuple qui dirige. Dans chacun des trois États, il y a un gouverneur de chaque sexe. Toutes les communautés ont droit de cité. Nous n’avons pas gagné Kobané en coupant des têtes et en ayant violé des femmes ! Je lance donc un appel au monde civilisé, il faut nous venir en aide. Si Kobané tombe, c’est le symbole de la fraternité d’un peuple qui tombe. Et aujourd’hui nous sommes le seul rempart pour éviter la création de l’État islamique. Si nous tombons, cela peut entraîner un effet domino. Car la Syrie entière, la Turquie, et même jusqu’aux confins de l’Europe, la Roumanie, la Bulgarie, pourraient un jour tomber. Et pourtant aujourd’hui le monde entier nous regarde nous faire massacrer sans que personne ne bouge le petit doigt.
Les États-Unis procèdent pourtant à des bombardements près de Kobané…
GHARIB HASSOU Oui, mais nous commençons à douter de l’objectif de ces frappes. Je ne comprends pas comment l’armée la plus puissante du monde, capable de viser un seul homme caché dans le désert, est incapable aujourd’hui de toucher un char de l’EI. Des combattants kurdes ont même été tués la semaine dernière lors d’une frappe américaine ratée. Le but de ces attaques était de faire reculer Daesh, elles ont eu l’effet inverse. Il n’y a d’ailleurs pas le moindre contact entre les combattants kurdes et l’état-major américain. En revanche nos frères kurdes d’Irak tentent de nous aider, notamment en menant des attaques du côté de Sinjar où sont réfugiés les yézidis, ce qui a permis un temps de desserrer l’étau de l’EI à Kobané, obligé d’envoyer quelques renforts en Irak. Mais tout cela ne suffit malheureusement pas. Au lieu de procéder à des frappes qui coûtent très cher, nous préférerions une aide en termes d’armes lourdes. C’est la seule chose dont nous avons besoin pour faire reculer Daesh. Malheureusement il y a des accords entre la Turquie et les Occidentaux qui ne veulent pas forcément que les lignes bougent au Moyen-Orient. Nous payons encore le poids des accords de Lausanne signés par les grandes puissances en 1923 pour diviser notre pays.

jeudi 8 janvier 2015

Kebbab dans le baba